Chez nous, Monsieur, on ne parle pas Français
La dernière histoire belge vient de sortir, avec la demande express – ou plutôt, formelle et militaire – d’un échevin (adjoint au maire) d’une ville de Flandre – Courtrai (Kortrijk), pour ne pas la citer – envers un entrepreneur voulant ouvrir son commerce dans les prochains jours. Ce brave homme décida de s’en sortir, au vu de la crise, par l’agencement d’une « friterie » (fleuron belge, s’il en est) où l’on pourra déguster des frites, en sachet ou barquette, avec sauce et fricadelle (nom qui vient de recevoir les honneurs du dico Le Robert). Mais là ou le brave homme pensait bien faire, il reçu les foudres de la guerre… linguistique d’un élu du parti nationaliste flamingant, la NV-A, qui est en charge de l’économie et du commerce dans la ville.
Non, Monsieur, ici on ne parle pas Français, nous sommes dans une ville flamande, et votre commerce doit refléter la langue de la région. Dès lors, je vous demande de bien vouloir changer votre enseigne et remplacer Frituur (oui, ça c’est du néerlandais) Grand Place, par Frituur Grote Markt ! Voilà comment on tue l’envie de s’installer comme indépendant dans notre beau pays, aux trois régions, avec autant de langues, et des gouvernements à ne plus savoir qu’en faire. Mais ce serait réducteur de ne voir que ce côté des choses. L’échevin en question ne semble pas avoir de mémoire, et oublie un peu vite que les Flamands sans le Français ne peuvent aller bien loin.
Nous avons eu l’occasion de réaliser l’émission du Club des auditeurs d’RFI à Ostende, et nous savons que tous les représentants de la ville, ainsi que d’Ostende à l’Ancre (la grande fête des bateaux de la cité balnéaire) s’expriment parfaitement en français, et même s’en trouvaient très bien de pouvoir le manier. De plus, il faut savoir également que la Belgique fut longtemps sous l’emprise de la France, avant que les Pays-Bas renversent la situation, avec la Bataille des Éperons d’Or, et que l’on débouchera vers la Révolution de 1830, et la formation de la Belgique.
Ceci est très résumé, certes, mais fait apparaître le Français, dès 1793. A ce moment, toute la partie du sud du pays parlait la langue de Molière, tandis que toute la bourgeoisie flamande (du nord) lui emboîtait le pas, et se faisait un honneur de s’exprimer en français. Même les écoles « privées et sélectes » enseignaient dans cette langue.
Alors, on ne comprend pas très bien cette prise de position d’un élu qui, pour être logique avec lui-même, devrait faire changer toutes les inscriptions dans une autre langue que le Néerlandais. A savoir, les enseignes de magasins en anglais. Et pour pousser le bouchon un peu plus loin, les noms des militants de la NV-A devraient également subir un lifting. Comme ce pauvre Jan JAMBON, député et leader au parlement pour son parti, qui deviendrait Jan HAM. Moins imagé, mais plus dans les cordes de Monsieur Rudolf Scherpereel, l’échevin de l’économie de la bonne ville de Courtrai.
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